L’encéphalopathie traumatique chronique (ETC) est un syndrome très sérieux. L’accumulation de commotions cérébrales ou même de secousses à la tête aussi faible qu’une tête au soccer, à répétition, à le potentiel de développer un ETC. En effet, des études analysant l’effet des sous-commotions observent des dommages avec des coups répétitifs d’aussi peu de 25G (un impact au football) alors qu’une commotion cérébrale est généralement présente à 70G de force (McCrory et coll., 2017).

Comme nous l’avons vu dans l’article sur la tauopathie, ces coups répétitifs causent une accumulation de la protéine tau qui initie et accélère le développement de la démence avec le vieillissement. Malheureusement, bien que cela soit assez pour nous alarmer à revisiter comment on approche les sports de contact, les effets nocifs ne s’arrêtent pas là. La science émergente montre de plus en plus un lien serré entre l’ETC et l’accumulation de bêta-amyloïde et de TDP-43, tous deux en cause du développement de différentes maladies cérébrales.

Bêta-amyloïde

Stein et collègues (2015) expliquent en grand détail l’association entre la présence de plaques bêta-amyloïde et une représentation symptomatiques de la tauopathie et de la démence à corps de Lewy, et ce, indépendamment de l’âge. Il semble y avoir un dépôt de plaques à un plus jeune âge et à un rythme accéléré dans 52% des cas d’ETC. Ainsi, par rapport à un groupe contrôle sain, lorsque les sujets vieillissent, on retrouve une concentration de plaques plus élevée chez les gens atteints d’ETC. Les chercheurs attribuent alors une grande importance à l’effet de ce peptide dans l’évolution de l’ETC. 

Il semblerait même qu’une seule commotion cérébrale soit nécessaire pour accélérer l’accumulation de la bêta-amyloïde. De plus, la quantité de plaques semble liée à la gravité des symptômes. En effet, les plaques séniles semblent responsables d’une augmentation de 4,5 fois plus de risque de développer une démence et 8,9 fois de parkinsonisme. 

Cependant, à ce jour, les mécanismes déclencheurs sont encore méconnus. Il est encore incertain si l’ethnie et la nature, fréquence et intensité de la commotion cérébrale ont un effet sur la bêta-amyloïde. Aussi, bien que les groupes touchés d’ETC comprennent souvent des comorbidités telles que l’abus de substances et la dépression, aucune corrélation significative ne peut être établie, montrant que l’ETC peut en elle seule mener un développement significatif de plaque bêta-amyloïde.

TDP-43

La TDP-43, une protéine seulement découverte en 2006 comme responsable derrière diverses pathologies comme la sclérose latérale amyotrophique, a été détectée dans le cerveau des personnes âgées de plus de 80 ans. Cela entama de multiples recherches sur une protéinopathie plus tard connue sous le nom de LATE (limbic-predominant age-related TDP-43 encephalopathy). 

L’accumulation de la protéine TDP-43 semble à ce jour être en cause du cinquième des cas diagnostiqués d’Alzheimer. L’accumulation normale de cette protéine avec l’âge semble offrir les mêmes symptômes cliniques qu’une telle démence, et ce, même sans grande présence de tauopathie ou de plaque bêta-amyloïde, malgré que plusieurs individus ont une représentation comorbide de ces trois conditions (Nelson et al., 2019).

Cela dit, dans des cas d’encéphalopathie traumatique chronique, on remarque une présence significative de la protéine TDP-43. À un stade avancé, la TDP-43 peut aussi se propager au niveau de la moelle épinière. Cela peut causer le développement d’une maladie neuromotrice plusieurs années avant la mort pouvant inclure une dysfonction du contrôle moteur comme dans les gestes de préhension, de marche, de parole, de déglutition et de respiration. 

Étant tout nouvellement découvert, son mécanisme exact la corrélant à l’ETC reste mystérieux, mais il semblerait que le traumatisme aux axones, le même qui cause le détachement des protéines tau, vient accélérer l’accumulation de la TDP-43. Puisque cette dernière est naturellement encline à l’agrégation, sa neurotoxicité apparaît rapidement (McKee et coll., 2010).

Effet chronique des mécanismes physiopathologiques

Chacun des biomarqueurs (protéine tau, bêta-amyloïde et TDP-43) a un effet cumulatif sur les symptômes perçus. Selon les régions cérébrales touchées par chacun d’entre eux, la nature et la gravité des symptômes ressenties seront variables. Ce n’est pas tous les patients qui ressentent les symptômes cliniques, malgré que plus l’ETC progresse, de plus en plus de patients en ressentent. Au final, rendus au stade 4 de l’ETC, tous les patients sont symptomatiques.

Les premiers symptômes ressentis sont les maux de tête, la perte d’attention et de la concentration. On retrouve aussi une difficulté d’accéder à la mémoire à court terme, des tendances dépressives et parfois agressives en plus d’explosivité. 

Plus l’ETC s’aggrave, que ce soit par le vieillissement ou l’accumulation de nouvelles secousses à la boîte crânienne, on peut observer des pertes de mémoire s’accompagnant de démence, de paranoïa, de difficultés visuo-spatiales et de difficultés motrices. Moins couramment, il peut y avoir présence de dysarthrie et de parkinsonisme. Dans l’étude de McKee et coll. (2013), le tiers des patients sont devenus suicidaire. 

Conclusion

La science est encore jeune sur l’encéphalopathie traumatique chronique. Bien que l’on commence à bien comprendre le rôle de la tauopathie sur les risques de démence associés à l’ETC, on ne fait que commencer à découvrir le lien entre la bêta-amyloïde et la TDP-43 sur les autres symptômes cliniques. 

Cela n’empêche pas de réaliser l’effet grave que les commotions cérébrales et les sous-commotions peuvent avoir. Il serait prudent de prendre des précautions dès aujourd’hui afin de diminuer les risques que nos athlètes, jeunes comme adultes, aient de sérieux problèmes cognitifs lors de leur fin de carrière. Bien que les mécanismes pathophysiologiques restent à confirmer, les symptômes sont bien réels.

 

Références

McCrory, P., Meeuwisse, W., Dvorak, J., Aubry, M., Bailes, J., Broglio, S., … & Davis, G. A. (2017). Consensus statement on concussion in sport—the 5th international conference on concussion in sport held in Berlin, October 2016. British journal of sports medicine, 51(11), 838-847. https://doi.org/10.1136/bjsports-2017-097699

McKee, A. C., Gavett, B. E., Stern, R. A., Nowinski, C. J., Cantu, R. C., Kowall, N. W., … & Morin, P. (2010). TDP-43 proteinopathy and motor neuron disease in chronic traumatic encephalopathy. Journal of Neuropathology & Experimental Neurology, 69(9), 918-929. https://dx.doi.org/10.1097%2FNEN.0b013e3181ee7d85

McKee, A. C., Stein, T. D., Nowinski, C. J., Stern, R. A., Daneshvar, D. H., Alvarez, V. E., … & Riley, D. O. (2013). The spectrum of disease in chronic traumatic encephalopathy. Brain, 136(1), 43-64. https://doi.org/10.1093/brain/aws307

Nelson, P. T., Dickson, D. W., Trojanowski, J. Q., Jack, C. R., Boyle, P. A., Arfanakis, K., … & Coyle-Gilchrist, I. T. (2019). Limbic-predominant age-related TDP-43 encephalopathy (LATE): consensus working group report. Brain, 142(6), 1503-1527. https://doi.org/10.1093/brain/awz099

Stein, T. D., Montenigro, P. H., Alvarez, V. E., Xia, W., Crary, J. F., Tripodis, Y., … & Kubilus, C. A. (2015). Beta-amyloid deposition in chronic traumatic encephalopathy. Acta neuropathologica, 130(1), 21-34. https://doi.org/10.1007/s00401-015-1435-y

Written by Joël Bérubé


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