Un facteur clé à la performance au basketball est certainement la hauteur du saut, autant pour améliorer la capacité offensive et défensive que pour faciliter les lancers au panier en réduisant l’angle de lancer. Optimiser la puissance des membres inférieurs a le potentiel d’augmenter la hauteur des sauts des athlètes et directement améliorer leur jeu. On peut alors se questionner sur une méthode optimale de préparation physique à cette fin.
Paula Sperlich, Michael Behringer et Joachim Mester ont remarqué qu’avoir une hauteur de saut supérieure aux adversaires offrait un avantage significatif et ont alors étudié une telle question dans une méta-analyse en 2016. L’article comporte plusieurs interventions de préparation physique, dont la pliométrie. Selon eux, cette dernière semble être une des méthodes d’entraînement les plus efficaces pour le développement du saut vertical, même chez des athlètes de haut niveau. Cette conclusion provient entre autres de l’étude de Khlifa et al. (2010) qui est intéressante pour deux raisons. Tout d’abord, alors que les exercices pliométriques sont fréquemment recommandés et utilisés dans le monde professionnel, la majorité des papiers scientifiques sont effectués chez les athlètes collégiaux, ne laissant que très peu d’évidence chez les athlètes professionnels. De plus, le papier porte un intérêt particulier sur l’effet d’exercer la pliométrie au poids du corps en comparaison à l’utilisation d’une charge externe relative d’environ 10 à 11% à la masse corporelle grâce à une veste lestée.
La pliométrie s’apprête bien à l’amélioration du saut vertical puisqu’il s’agit d’une technique spécifique au mouvement réel. Plutôt que de se limiter au développement de la force ou de la vitesse de mouvement indépendamment, il est alors possible d’entraîner la contraction rapide des muscles des membres inférieurs. L’implication du cycle étirement-raccourcissement sur le saut permet aux joueurs de bénéficier de la capacité élastique des muscles en plus du réflexe myotatique pour améliorer la performance de leur saut vertical. De plus, ce type d’entraînement va permettre d’optimiser l’atterrissage et ainsi diminuer les risques de blessures en plus d’améliorer le transfert d’énergie vers la course.
L’équipe et leur entraînement en pliométrie
L’étude de Khlifa et al. comprend 27 joueurs de basketball de la division professionnel de la Tunisie. Les hommes ont été divisés en trois groupes. Le groupe expérimental à poids de corps a suivi un protocole d’entraînement déjà montré comme efficace par Luebbers et al. (2003). Ce protocole contient des sauts verticaux et horizontaux en plus d’exercices de puissances horizontales comme de courts sprints. Le deuxième groupe expérimental a suivi le même protocole avec pour seule différence l’ajout d’une veste lestée d’une charge d’environ 11% du poids du participant. Le groupe contrôle a simplement pris part à des entraînements de basketball, sans aucune préparation physique. Puisque des études antérieures ont montré que la durée est plus importante que l’intensité avec la pliométrie, le protocole total a été effectué sur dix semaines. Les résultats ont été évalués à l’aide de tests de sauts verticaux et horizontaux. Lors des trois premières semaines, deux entraînements de 90 minutes étaient effectués. Les sept semaines suivantes, il y a eu une augmentation à 3 séances hebdomadaires. Chaque exercice permettait 15 à 40 secondes de repos entre les répétitions et 2 à 3 minutes entre les séries.
Le potentiel d’amélioration du saut vertical
Sachant que les joueurs étaient de niveau professionnel avec en moyenne 12 ans d’expérience, il est intéressant de noter une nette amélioration des performances. Selon les résultats de cette étude, l’entraînement en pliométrie permet d’atteindre 5,8% d’amélioration au squat sauté alors que le groupe utilisant une charge externe a vu une amélioration de 9,9%. Les résultats de saut vertical avec contre-mouvement montrent une amélioration de 7% et de 12,2% avec l’ajout de la veste lestée. En ce qui concerne le saut horizontal, un gain de 5,6% a été noté dans le groupe pliométrique et un gain de 7,5% chez le groupe avec veste lestée. En bref, cela signifie que même un athlète bien entraîné peut ajouter jusqu’à 5,34 cm à son saut vertical!
Les prises de mesure lors des évaluations ont toutes été effectuées par le même évaluateur à l’aide de photocellule infrarouge. La performance en saut vertical fut testée par l’intermédiaire du squat sauté (fig.1) et du saut vertical avec contre-mouvement (fig.2) selon le protocole de Bosco et al. (1983). Tous les sauts sont standardisés par l’appui des mains aux hanches ainsi qu’une flexion de genoux de 90 degrés au début de la phase de propulsion. Le saut horizontal est évalué à l’aide du five-jump test (5JT) (fig.3). Ce dernier comporte cinq foulées consécutives avec la position des pieds joints au début et à la fin des sauts, le but étant d’atteindre une distance maximale.
L’étude présente bien entendu certaines limitations. Effectivement, on peut entre autres noter un échantillonnage assez faible. Une fois l’équipe divisée en trois sous-groupes, chaque expérimentation comprenait seulement 9 joueurs. De plus, étant une des premières études à investiguer l’ajout d’une charge externe en combinaison à la pliométrie et ce, particulièrement chez les joueurs élites, d’autres études seraient à effectuer afin de confirmer les résultats. Il pourrait aussi être intéressant de tenter la même expérimentation chez les femmes et chez des athlètes avec une expérience d’entraînements différente.
En conclusion, il est clair que l’utilisation de la pliométrie est en elle seule une technique efficace pour bonifier le saut vertical des athlètes professionnels. À la vu des résultats, il semblerait aussi que l’ajout d’une charge externe d’environ 11% de la masse corporelle permet de significativement améliorer la hauteur de saut vertical.
Application pratique
Pour appliquer ces résultats, il est important d’assurer une progression appropriée afin de protéger des blessures et pour assurer un maximum d’amélioration. Basé sur le protocole cité dans l’étude, commencer par 3 semaines avec deux entraînements de 90 minutes hebdomadaires pour ensuite progresser à 3 séances par semaine semble recommandable. Faire progresser l’athlète durant un programme d’au moins deux mois semble idéal, malgré que plus d’études seront nécessaires pour montrer une durée optimale. Des exercices typiques pouvant être utilisés sont le saut vertical bipodal, le tuck jump, le saut en longueur, les foulées pliométrique, des séquences de sauts bipodaux (2-legged bounding) et le drop jump. Chaque exercice est effectué sur plusieurs répétitions avec 15 à 30 secondes de repos entre chacune d’entre elles. En parallèle aux entraînements de préparation physique, les entraînements spécifiques au sport sont maintenus. À cette fin, il est recommandé de positionner l’entraînement en pliométrie au moins 6 heures avant un match ou une pratique technique. En effet, Woolstenhulme et al. (2004) a montré chez des athlètes collégiaux que seulement quelques heures sont requises pour récupérer de façon suffisante et performer maximalement. L’auteur conclut qu’effectuer un entraînement 6 heures avant un match n’a pas d’effet négatif sur la hauteur du saut vertical, la puissance anaérobie et la précision au lancer. Ainsi, l’entraînement peut être fait le matin, alors qu’un match ou une pratique est prévu en soirée.
Figure 1, 2 et 3 sont créditées à Physigraphe
Références