L’encéphalopathie traumatique chronique, ou ETC, est une neurodégénérescence progressive du cerveau caractérisée par une accumulation anormale de protéine tau hyperphosphorylée.
Comme plusieurs maladies neurodégénératives, le diagnostic ne peut être défini que suivant l’autopsie, laissant la condition encore à ce jour plutôt mystérieuse. Cette condition semble initiée et accélérée par le cumul répétitif de commotions cérébrales (McKee et coll., 2016). Nous allons voir que les risques sont importants et il serait sage d’implémenter un plan d’intervention préventif chez les athlètes qui sont à risque de traumatisme cranio-cérébral léger (TCCL) répété dans leur carrière.
Chaque année, 38 millions de jeunes Américains participent à des sports organisés. Ce nombre atteint 170 millions de personnes lorsque l’on considère la simple pratique d’activité physique. Annuellement, 1,7 million d’entre eux subissent un TCCL et voient leurs risques de développer des problèmes de santé augmenter lors de leur vieillissement (Daneshvar et coll., 2011).
L’ETC se présente en quatre stages. Chacun d’entre eux présente des symptômes cliniques progressivement plus sévères (McKee et coll., 2013). Lorsqu’il vient à expliquer les mécanismes d’évolution, la littérature scientifique présente trois principales théories: la tauopathie, l’accumulation de protéine bêta-amyloïde et la TDP-43. Cet article sera consacré à la tauopathie.
La tauopathie
La tauopathie est un groupe de condition neurodégénérative qui n’est pas encore pleinement compris, mais qui explique les maladies de démences comme l’Alzheimer.
La protéine tau a pour rôle de stabiliser les microtubules des axones des neurones. Cette protéine est essentielle au bon fonctionnement cérébral, mais peut devenir pathogène (nocive) lors de certains événements tels que la mutation du gène Tau, l’apparition de syndromes métaboliques, l’hyperactivité de la mTor, l’accumulation de bêta-amyloïde et les traumatismes crâniens. Lors de ces incidents, la protéine tau devient phosphorylée, se détache du microtubule et s’accumule dans le soma des neurones. Cela cause un dysfonctionnement des neurones et ultimement leur apoptose (leur mort).
Il y a deux principaux mécanismes semblant expliquer ce dysfonctionnement. Premièrement, les protéines phosphorylées cause une cascade cellulaire causant la protéine tau à stabiliser excessivement le cytosquelette d’actine, un filament cellulaire, causant une diminution de la plasticité synaptique et une mort éventuelle du neurone. Deuxièmement, des études in vitro ont observé la protéine se lier à l’ADN à l’intérieur du noyau lui causant des dommages directs.
Lors d’un traumatisme crânien, trois mécanismes spécifiques peuvent initier la dysfonction de la protéine tau. Tout d’abord, la concentration de phosphatase alcaline se voit diminuée. Puisque cette molécule permet la déphosphorylation de la protéine tau, cette dernière devient de plus en plus phosphorylé causant son détachement. Ensuite, une rupture des axones causée par le choc biomécanique peut causer un détachement de la protéine tau des microtubules. Finalement, il semblerait que l’inflammation chronique causée par le déséquilibre chimique à l’intérieur du cerveau par le TCCL soutient et amplifie la tauopathie.
Ainsi, de telles théories montrent qu’un traumatisme crânien comme une commotion cérébrale peuvent potentiellement jouer le rôle de déclencheur d’une tauopathie ou même d’accélérateur, causant le développement de démence relié à l’âge accentué ou même déclenché plus tôt dans une vie (Orr et coll., 2017).
Malgré tout, la tauopathie reliée à l’ETC se différencie des autres conditions comme l’Alzheimer, qui pour sa part suit un processus hiérarchisé (Braak, 1991). En effet, dans un cas d’Alzheimer, l’hippocampe est le premier touché, suivi du lobe temporal, les autres régions polymodales associatives, les régions unimodales, l’ensemble du cortex cérébral et finalement les régions primaires. Au contraire, dans un cas d’ETC, la tauopathie se développe de façon non définie. Elle peut débuter dans diverses régions cérébrales et peut se propager de façon désordonnée. Cela peut possiblement être influencé par la vitesse de l’impact et les régions cérébrales affectées, malgré que les études ne montrent pas encore de lien clair et précis (Washington et al., 2016).
Conclusion
Bien que le développement de l’ETC ne se réserve pas à la présence d’une tauopathie (l’accumulation de protéine bêta-amyloïde et de la TDP-43 sont aussi en cause), il s’agit de la théorie la plus communément partagée. Même en omettant ces deux dernières théories, il y a de quoi s’alarmer. L’Alzheimer est une maladie qui affecterait tout le monde si l’on pouvait vivre assez longtemps. Il est alors qu’une question de temps.
Cependant, ce que je veux vous faire comprendre, c’est que l’accumulation de plusieurs commotions cérébrales (et même potentiellement des plus faibles coups que l’on caractérise de sous-commotion cérébrale) a le potentiel d’accélérer l’accumulation de protéine tau et d’augmenter les risques de développer une démence comme l’Alzheimer lors du vieillissement. Ainsi, que l’athlète soit jeune ou adulte, il est important de le protéger des coups inutiles. Votre santé est entre vos mains!
Références
https://doi.org/10.1016/j.csm.2010.08.006