La santé est un domaine très complexe. Aussitôt que nous apprenons qu’un certain mode de vie peut être dangereux, de nouvelles études pointent du doigt un nouveau suspect. Ironiquement, alors que tout le monde se concentre sur le coupable évident qu’est l’alimentation, on découvre peu à peu que son implication sur notre mortalité est plus faible que l’on pourrait penser.
Le cercle vicieux dans lequel nos “avancées” scientifiques se trouvent est causé par une raison bien simple: les facteurs confondants. Alors que l’on peut facilement conserver une souris en cage afin de limiter ses interactions avec le monde environnant, il est simplement impossible de le faire chez les humains, tout du moins si l’on considère l’éthique de la question.
Absolument toutes les études chez l’homme sont biaisées par les multitudes d’interactions quotidiennes. Que ce soit question de génétique, de pollution, de la présence d’activité physique ou tout autre facteur confondant, les résultats ne sont jamais exactes. Cette généralité nous permet toutefois d’établir une question intéressante, soit que si chaque diète comprend des bénéfices indéniables, pourquoi notre taux de mortalité augmente-t-il de plus en plus?
La réponse probable? Notre environnement a un plus grand impact sur notre santé que ce que l’on ingère.
Plusieurs facteurs environnementaux peuvent entrer en jeu. Les champs électromagnétiques, la pollution, le soleil, le mouvement, etc. Par contre, pour cet article, j’aimerais discuter d’un risque croissant dans notre société: les fragrances artificielles.
Un taux d’affectation surprenant
Il faut seulement se rendre dans la salle de bain pour trouver des centaines d’éléments toxiques volatiles. Du simple désodorisant aux produits de nettoyage et produits de soins personnels, il est facile d’entrer en contact avec de telles toxines. Pire encore, il suffit de se rendre au travail ou dans les transports en commun pour être envahie des parfums portés par nos confrères.
Contrairement aux arômes naturels qui peuvent être utilisés à des fins médicales1, les agents artificiels peuvent utiliser le même mécanisme pour nous nuire. Alors que la majorité de la population est inconsciente de l’effet de ces odeurs, plus de la moitié des gens sont affectés d’une façon ou d’une autre.
Facilement un tiers de la population reporte des problèmes de santés causés par la présence de fragrance dans leur environnement. On peut d’ailleurs noter l’apparition de maux de tête chez 10% du monde ainsi que des problèmes respiratoires comme l’augmentation de crises d’asthme, de toux et d’essoufflement chez 20% de la population.2
Malheureusement, les effets indésirables ne se limitent pas à ces problèmes de surface, des risques beaucoup plus élevés peuvent se développer.
Les fragrances sont la nouvelle fumée secondaire
Une analyse réalisée en 2008 a révélé que les six principaux produits de lessive contenaient près de 100 composés organiques volatils et que cinq de ces six produits émettent un ou plusieurs polluants atmosphériques dangereux et carcinogènes. Comme référence, la fumée secondaire de la cigarette traditionnelle contient plus de 4000 produits chimiques, incluant au moins 69 composantes carcinogènes. Encore aujourd’hui, il n’y a pas de niveau d’inhalation considéré comme sécuritaire pour la majorité de ces produits. Il en va de même pour nos charmantes fragrances que l’on devrait éviter le plus possible.3
Bien que les fragrances semblent à première vu peu nocives (après tout, 100 composés semble relativement faible en comparaison à la cigarette), les produits sont souvent configurés afin de relâcher tranquillement et continuellement une odeur. Ainsi, contrairement aux produits de tabac, notre exposition aux parfums est souvent prolongée, ce qui peut facilement rivaliser les effets néfastes de la cigarette.
Les risques cachés des fragrances
Les fragrances sont maintenant connues comme un irritant respiratoire ainsi qu’une toxine neurologique. Même chez les sujets en santé, la présence d’un parfum dans l’air cause le relâchement d’histamine dans le système.4 Cette réaction inflammatoire peut, sur le court terme, se limiter à une faible réaction cutanée ou respiratoire (comme l’asthme), mais sur le long terme, la présence de parfums peut développer une inflammation des membranes mucosales qui peut entamer des sinusites, la rhinite et la dermatite. Une fois à l’intérieur du corps, les fragrances peuvent causer des dommages au système immunitaire, des affectations au système digestif, des changements de la pression artérielle et augmente les risques de cancer.5
Le cerveau n’est malheureusement pas épargné. En plus des migraines mentionnées plus haut, d’autres études ont aussi remarqué l’augmentation des risques de dépression, d’irritabilité, de vertige, d’anxiété, de perte de mémoire, d’insomnie et une panoplie d’autres effets.6
La prévalence des fragrances artificielles est à la base du danger
Il y a plus de 70 000 différents produits chimiques utilisés dans les lignes de production de nos industries modernes. Parmi ceux-ci, facilement plus de 4000 sont directement utilisés pour la fabrication de fragrances et jusqu’à 100 peuvent être simultanément utilisés dans un même produit.
Par leur nature, ces composantes sont hautement volatiles et s’infiltrent aisément dans notre système respiratoire et du même fait, dans notre système sanguin. En d’autres mots, ils ont la capacité d’atteindre n’importe quel organe sans aucun problème par une simple bouffée d’air.
Le pire, ces fragrances ne sont pas limitées aux parfums! On retrouve des fragrances dans les produits esthétiques (savons, shampoing, déodorant, lotions, crèmes solaires), dans les accessoires d’hygiène (rince-bouche, soie dentaire, poudres de bébé, couches, papiers et même certains aliments! Bien entendu, la liste est beaucoup plus longue puisque la majorité des produits modernes en contiennent afin d’attirer les consommateurs.7
En conclusion…
Contrairement aux changements diététiques qui peuvent être difficiles à incorporer, arrêter l’utilisation de parfums artificiels se fait plutôt bien. Cela ne veut pas nécessairement dire qu’il est nécessaire de couper toutes fragrances, il existe des parfums et arômes naturels pouvant être utilisés comme substitut. Par contre, lorsque vient le temps de choisir un produit ménager ou esthétique, cela vaut la peine de choisir la bouteille qui est “sans fragrance”. Ton corps va te remercier.
Références
1. https://fr.wikipedia.org/wiki/Aromath%C3%A9rapie
2. Steinemann, A. (2017). Health and societal effects from exposure to fragranced consumer products. Preventive medicine reports, 5, 45-47.
3. De Vader, C. L., & Barker, P. (2009). Fragrance in the workplace is the new second-hand smoke. Proceedings of the ASBBS, 16(1), 1-11.
4. Elberling, J., Skov, P. S., Mosbech, H., Holst, H., Dirksen, A., & Johansen, J. D. (2007). Increased release of histamine in patients with respiratory symptoms related to perfume. Clinical & Experimental Allergy, 37(11), 1676-1680.
5. http://www.massnurses.org/news-and-events/archive/2006/p/openItem/1347
6. Wallace, L., W. Nelson, E. Pellizzari, J. Raymer, AND K. Thomas. IDENTIFICATION OF POLAR VOLATILE ORGANIC COMPOUNDS IN CONSUMER PRODUCTS AND COMMON MICROENVIRONMENTS. U.S. Environmental Protection Agency, Washington, D.C., EPA/600/D-91/074 (NTIS PB91182865), 1991.
7. De Vader, C. L., & Barker, P. (2009). Fragrance in the workplace is the new second-hand smoke. Proceedings of the ASBBS, 16(1), 1-11.